La politique française à vue d'oeil
de Maurice Griffe, TSH, 2012, dépliant synoptique
La vie politique française n'est pas un long fleuve tranquille. En ce sens, les surprenantes présidentielles 2017 ne dérogent pas à la règle. Preuve par le tableau synoptique.
Les élections de 2017 sont-elles aberrantes ? A l'heure où sont écrites ces lignes, les commentateurs professionnels comme le simple citoyen s'accordent à trouver cette campagne hors norme voire profondément perturbante. Autrement dit, les présidentielles 2017 constitueraient une forme d'anomalie dans le tranquille déroulé de nos institutions. Est-ce le cas et comment le savoir ?
Pour cela, on pourra consulter « Chronologie du pouvoir politique », paru en 2012 chez la très spécialisée et très confidentielle maison d'édition TSH.
TSH comme « Tableaux Synoptiques de l'Histoire » est une société qui a toujours reposé sur les épaules d'un seul homme, Maurice Griffe (1921-2013), historien spécialisé dans l'étude des chronologies. Rappelons qu'un synoptique désigne une présentation, en général graphique, qui permet de saisir d?un seul coup d'oeil un système complexe : un plan d'aménagement urbain par exemple, un écosystème, ou encore une chronologie politique.
« Chronologie du pouvoir
politique » s'attache aux 300 dernières années de l'Etat en
France et se présente sous forme de dépliant. Il montre également
certaines évolutions thématiques comme celles des lieux de
pouvoirs, des constitutions ou des rapports de force idéologiques.
Au premier coup d'oeil -comme il se doit- une évidence frappe :
l'extraordinaire instabilité du fait politique en France depuis les
premières lueurs des Lumières au XVIIIe siècle.
La postérité d'Alexandre Ribot
Seize constitutions depuis les Etats généraux de 1788, une soixantaine de majorités législatives, des chefs d'état et de gouvernements par dizaines, des centaines d'événements de toutes sortes modifiant le cours des opinions et des régimes : voici vu du ciel l'aspect de notre si sereine vie politique. Qui peux citer la succession des présidents français depuis Louis-Napoléon Bonaparte, le premier d'entre eux en 1848 ? Qui se souvient d'Alexandre Ribot, président du conseil des ministres cinq fois au cours de sa carrière entre 1892 et 1917 ? Peu de gens, et pourtant cet homme fut chef des armées au pire moment de la guerre 14-18.
Faut-il pour autant ne voir dans ce panorama qu'une vaine agitation ? Non car des forces objectives structurent la vie politique. Visuellement, la Ve République est clairement plus stable que les précédents régimes. C'est aussi le moment où apparaissent des visages féminins dans les trombinoscopes.
D'un point de vue idéologique là aussi, de grands mouvements évolutifs sont à l'oeuvre. Tout au long du XIXe siècle, on constate l'érosion progressive de la droite royaliste puis bonapartiste au profit des Républicains. Mais il faut attendre la Libération pour voir se dessiner un paysage partisan plus familier à nos yeux avec une gauche et une droite républicaines clairement identifiables.
Les lieux de pouvoir sont encore plus
pérennes. Le palais de l'Elysée est celui de la présidence dès la
IIe République ; le palais Bourbon accueille les débats
parlementaires dès la Ière. Quant à Versailles, il est aujourd'hui
encore le lieu où se réunit le Congrès pour d'éventuelles
modifications constitutionnelles. Le scrutin à venir modifiera-t-il
l'aspect toujours monarchique de nos institutions ? Début de
réponse dans trois semaines.
Eric