Batman - White Knight
Sean Murphy, Urban Comics, 2018, 212 p.
L'intro ouvre sur une pleine page :
paysage de nuit/chauves-souris/vue d'ensemble sur le gigantesque
manoir d'Arkham. Dans un vrombissement, la Batmobile passe le portail
de l'asile. Le visiteur est accueilli par la sécurité, puis, dans
l'ombre, escorté jusqu'à une cellule sise dans les sombres dédales
étroitement surveillés de l'hôpital psychiatrique. Dans cette dite
cellule, Batman est enchaîné. C'est Jack Napier - le Joker - sans
mascara ni artifices, qui visite le prisonnier, & non l'inverse,
comme de tout temps ce fût le cas...
Rédemption en (noir &) blanc
Les psychiatres de Gotham le disent depuis longtemps &
s'accordent sur le sujet : le chevalier noir est tout aussi
frappadingue - & dangereux pour la société ! que les
sociopathes qu'il traque. Au cours d'un affrontement qu'ils se
livrent dans les rues de la mégapole - & qui, en soit, constitue
un classique dans l'histoire du justicier & de son ennemi attitré
- Batman fait avaler au Joker un tube entier de pilules censées agir
sur ses troubles mentaux.
De fait, à mesure que Batman sombre
visiblement plus encore dans la noirceur & la violence, le Joker,
suite à ce traitement médicamenteux radical, a changé du tout au
tout, au point d'apparaître aux yeux des médecins & des
citoyens comme un chevalier blanc, & de présenter sa candidature
à la mairie de Gotham City.
Les rôles se sont-ils réellement
inversés, ou s'agit-il encore une fois d'un plan machiavélique
ayant germé dans le cerveau disjoncté du Joker afin de régner sur
Gotham...?
Paranoïaque, borderline, & pourtant infaillible
Batman est devenu un personnage sombre,
tourmenté & violent au milieu des années 1980, lorsque Frank
Miller l'a dépoussiéré & réhabilité avec son Dark Knight
; à partir de là, exit le Batman Détective de mon
enfance (avec sa petite loupe & son colt 45 à la ceinture).
Sean Murphy s'inscrit ici dans la lignée de cet état de fait : dans
son récit, sous ses traits obscurs & torturés, notre héros en
devient même inquiétant, parano, incontrôlable. C'est pourtant
encore & toujours lui, transcendé par l'adversité &
l'abnégation, qui sauvera une fois de plus Gotham du chaos... comme
tout bon justicier qui se respecte !
Fred