Cosmix Banditos
Roman policier. Pour adulte
Cosmix Banditos, de Allan C. Weisbecker, Folio Policier, 2019, 294 p.
Weisbecker « s’inspire de ses années d’errances psychédéliques » pour proposer un récit absolument déjanté. Son personnage et High Pockets, son chien, accoquinés à Jim, Robert et Flash (trois pieds nickelés chargés à bloc, armés et dangereux), sont associés aux Banditos colombiens pour faire transiter les plus gros tonnages de marijuana jamais réalisés. Sauf que tout foire (+ ou -) toujours.
Recherché par les Federales des « Amériques du Sud et centrale », ainsi qu’aux U.S.A par le F.B.I, le Bureau des Narcotiques et la C.I.A, Weisbecker (ou du moins son personnage, puisque avant de s’atteler à l’écriture, l’auteur s’est d’abord, par exemple, consacré aux « petits trafics »*) se terre dans une cabane, au cœur de la jungle colombienne. José, un Bandito Seigneur de la Dope, les ravitaille, son chien et lui. High Pockets (c’est son nom) est un « chien philosophe ». Aussi notre héros s’adonne t-il entre autres avec lui à la méditation transcendantale. Un matin, à l’aéroport de Santa Marta, José et « deux membres de sa clique » Banditos détroussent une famille d’Américains dont le père s’avère être un scientifique ; ses recherches portent sur la Physique des Quanta et le processus des particules Sub-Atomiques (notes et ouvrages de références à l’appui). Fasciné, notre héros se lance à corps perdu sur le chemin de la Connaissance. Les livres dont il a besoin, il les envoie quérir par José et ses Banditos à la bibliothèque de Recherche de l’université de Baranquilla. José & Cie opèrent à la façon Banditos : ils débarquent en force, tôt le matin, car « (…) les Banditos aiment attaquer avec le soleil dans le dos », fauchent les livres de la liste (+ environ 200 autres titres, au cas où), et se font la belle (avec au passage une escarmouche avec un peloton de l’armée colombienne, réglée à coups de mortiers, de lance-roquettes et de grenades, laissant l’établissement en cendres derrière eux). Par précaution, les Banditos ramènent également de leur raid el señor Rodriguez, directeur de l’université ; il faut pallier à toute éventualité). Fort de cette documentation, notre héros décide d’entretenir une correspondance avec le scientifique californien, afin de traiter avec lui de particules Sub-Atomiques, ainsi que de convertir High Pockets et José à la Théorie des Quanta et éveiller ainsi la Conscience Banditos du trafiquant.
« Bananes et Banditos (…) ne sont que de simples ondulations du néant »
Au milieu de ce chaos psychédélique, notre héros nous expose, à nous, « astucieux et avisé(s) lecteur(s) » que nous sommes, les événements qui l’ont amené là, mais pas nécessairement de façon chronologique . Dans ces évènements sont impliqués ses amis et complices, Jim et Robert, deux dangereux psychopathes armés et consommateurs extrêmes de cocaïne, ainsi que Flash, un pilote d’avion sans diplôme qui préfère voler au ras des arbres**, parce que quand on tombe, on tombe de moins haut. Leur taf ? Acheminer d’un point A à un point B les plus gros tonnages de marijuana jamais réalisés. Bien entendu, tout foire plus ou moins toujours, que ce soit le largage de marchandise ou l’organisation dans son ensemble...étonnant, non ?
Hallucination Banditos
Un roman, donc, complètement déjanté, dont il est parfois aisé de perdre un peu le fil. Les notes explicatives (alambiquées à souhait) de l’auteur sont fréquentes, et constituent quelquefois des pavés assez importants en renvoi de bas de page (jusqu’à 1/2 !) ; toutes - ou presque - emberlificotent un peu plus le récit en lui-même. Comme un leitmotiv, des citations de scientifiques renommés – tirées des lectures de notre héros – closent chaque chapitre. Les quantités astronomiques de marijuana, consommées quotidiennement et couplées aux flots de Mescal***, corsés « de copieuses quantités de champignons hallucinogènes », la plupart du temps avalés par « rasades particulièrement longues »****, sans doute, trouvent quelques responsabilités dans les circonvolutions littéraires de notre Narrateur Cosmique. Mais c’est son style, et le moins que l’on puisse dire est que fond et forme s’accordent à la perfection : Cosmix Banditos n’est certainement pas « devenu une œuvre culte » pour rien !
Fred.
* « Croyez-le ou non, j’ai eu une enfance normale. Je ne comprends donc absolument pas pourquoi ma vie est ce qu’elle est ».
** « Flash taillait la cime des arbres de la forêt tropicale, usant des deux ailes comme d’une gigantesque tondeuse ».
***Mescal étant certainement le nom propre revenant le plus souvent dans cet ouvrage, outre ceux des personnages (et pis aussi des chiens), en dehors, bien entendu, de tout ce qui dans les propos de ACW englobe la Mécanique Quantique ; d’ailleurs, en dépit du fait que les personnages soient déconnectés en raison des nombreuses et diverses substances qu’ils s’octroient à longueur de temps de manière tout à fait abusive et inconsidérée, et que ces dits personnages soient, de plus, des trafiquants recherchés par la moitié des polices du globe, c’est peut-être de cette dernière dont il est finalement le plus question ici.
**** « Robert passait le mescal à Flash, Flash passait le joint à Robert. Jim était occupé par un quart de Tequila Cuervo Gold ».
(ah oui, et aussi, pour toutes sortes de raisons liées à l’excès ou à l’action, notre héros perd connaissance à de multiples reprises lors de ses péripéties rocambolesques...)